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Anything Weird
27 mars 2008

Nous, Les Héros

9094020422Là, il s'agit d'un texte que nous avons étudié en théâtre et que nous représenterons en fin d'année (avec "La Fausse Suivante" de Marivaux, dont je parlerais sans doute plus tard), et qui est particulièrement intéressant en cela qu'il est une sorte d'hommage aux acteurs. C'est un texte très poignant, à la fois drôle et profondément triste, qui fait sourire puis rend mal à l'aise. Une troupe à la Molière d'acteurs un peu à la ramasse vit sa vie... On s'apprête à fêter des fiançailles, on se demande où on va aller, on réfléchit à la prochaine pièce... L'écriture de Jean Luc Lagarce est, au départ, un peu difficile, et on met un moment à se plonger dedans, mais dès qu'on a compris le truc tout semble infiniment fluide et réel. Je poste un article là dessus parce qu'aujourd'hui j'ai redécouvert tout un passage qui ne m'avait pas frappé à la base, et que je trouve aujourd'hui très poignant.

Mme Tchissik, belle jeune femme, expliquant à un prétendant pourquoi en dépit de tout elle aime son mari, bien qu'il soit ridicule :

"Pourquoi une femme comme moi a-t'elle pu unir sa vie avec un homme tel que lui, tout le monde depuis de nombreuses années se demande cela et se moque de lui et me plaint et encore, me soupçonne de mensonge, de fausseté et le juge ridicule.
La prétention médiocre des jolies personnes...

Les garçons comme vous, à vouloir me promettre tant de choses si je promettais avant eux,
les garçons comme vous, quelques petits épargnats de l'amour, ne sachant trop si ils doivent tout miser ou se réserver pour des épouses comme votre Joséphine (cf : fille un peu potiche dans la pièce, qui va se fiancer avec le prétendant),
les garçons comme vous, sans force,
vous n'imaginez pas combien j'en ai vus, combien j'en ai entendus, combien tard dans la nuit sont venus me faire leurs adieux émus, espérant lâchement que je leur céderais ecore à cet instant ultime.
Vous n'imaginez pas.

Lui, là, mon mari, l'homme avec qui je décidai de partager la vie,
et elle fut difficile et elle le sera plus encore, de plus en plus, je ne l'ignore pas,
lui, là, mon mari, il est venu vers moi, un jour, un peu ridicule, un peu emprunté comme il le fait toujours, comme il a toujours été,
un peu vulgaire aussi, pourquoi non ?
lui,
il est venu vers moi et il m'a demandé vraiment,
Vraiment, je ne saurais pas mieux dire.

Il m'a dit qu'il m'aimait.

Vous pouvez chercher dans votre mémoire, vous avez oublié de me dire ça, vous l'avez gardé pour l'estocade finale, en réserve, l'arme définitive.
Vous ne me l'avez pas encore dit.

Lui, il a dit ça en commençant, il s'est laissé aller vers le ridicule le plus grand, il s'est planté devant moi tel qu'il est et il m'a dit qu'il m'aimait. Il avait peur, je crois bien.

Il m'a dit qu'il m'aimerait vraiment, si je ne l'aimais pas,
et qu'il m'aimerait encore, vraiment, loin de moi, si je devais le rejeter et si plus jamais nous ne nous rencontrions.
Il était là devant moi, il était comme il a toujours été, il ne trichait pas, il n'attendait rien,
il disait juste,
il avait dit et il me laissait répondre.
Il n'exigeait rien de moi, il ne me reprochait rien par avance, il ne me promettait pas qu'il serait malheureux si je le refusais.
Et j'ai pensé, je ne l'avais jamais pensé auparavant, j'ai pensé que cet homme là, un peu ridicule, un peu perdu, avec sa peur, que cet homme là m'aimait peut être comme jamais encore personne ne m'avait aimée.
Vraiment, sans négociation, sans ce petit chantage mélancolique que prennent les hommes pour se garantir de l'avenir.

Il attendait, il n'exigeait rien. Il était émouvant comme aucun de ces petits garçons depuis ne l'a jamais été et n'a réussi à me détourner de lui. Il disait avec tout le courage du monde son amour pour moi et sa vérité.
Et j'ai su qu'il y avait un secret entre lui et moi.
Et j'ai eu de la tendresse pour lui."

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Commentaires
P
hey mon monologue ^^<br /> j'éspère ne pas t'avoir décue, et moi aussi j'ai mis du temps avant de la remarquer, c'est en en parlant que je l'ai compri et apprécié
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